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Paris, capitale de la mode éthique et durable ?


Le soir du 8 octobre 2023, la somptueuse cour du Palais Galliera, musée de la mode de la ville de Paris, accueillait le Défilé des autres modes. Celui-ci était l’événement de clôture de la Semaine des autres modes, organisé à Paris juste après la Fashion Week. Le pari était ambitieux : réunir, le temps d’une soirée, des pièces issues de la mode durable, un casting inclusif et une scénographie minimaliste. Le Moment était présent lors du défilé et vous raconte à quoi ressemble un défilé de mode responsable.


Reportage de Danaé Moyano Rodriguez


Photo de Danaé Moyano Rodriguez, mannequin @fiftyyearsofawoman, Paris 2023


Du 2 au 8 octobre le collectif Une autre mode est possible (UAMEP) organisait une semaine dédiée à la mode éthique et durable, la Semaine des autres modes. Avec la réparation comme fil conducteur, l’événement était organisé autour de quatre parcours : entreprises, consommation durable, transmission et artistique. Son objectif était de permettre à tous.tes de découvrir les acteur.ices de la mode responsable à Paris et en proche banlieue.


Un événement phare venait clore cette semaine de la mode responsable : le Défilé des autres modes, accueilli pour la première fois par le musée de la mode de la ville de Paris. Le thème du défilé était inspiré par le concept d’humanitude d’Albert Jacquard, concept qui “illustre les dimensions d’inclusion, de lien et de réparation qui permettent de faire corps ensemble, quelles que soient nos origines et notre condition sociale, physique et/ou philosophique” rappelle le collectif UAMEP.


“Faire corps ensemble”, une idée qui se ressent tout au long du défilé car malgré le cadre majestueux du palais Galliera, cela reste un défilé à taille humaine avec un décor à la fois sobre mais élégant, sans pour autant perdre l’ambiance féerique qui caractérise les mises en scène de la haute couture. Le public était disposé dans la cour mais aussi dans les couloirs qui partaient de chaque côté de celle-ci. Il n’y avait pas de passerelle et pendant le défilé, les mannequins occupaient l’ensemble de la cour en déambulant devant le public installé lui aussi partout dans l’espace dédié au défilé.


Vidéo de Danaé Moyano Rodriguez, mannequin @claratypical, Paris 2023


Arielle Levy, fondatrice du collectif UAMEP, ouvre le défilé en insistant sur le besoin de “faire corps ensemble et se relier” car pour elle “c’est ça la mode de demain !” La mode comme un projet humain avant tout. C’est ainsi que s’ouvre ce défilé d’une trentaine de minutes pendant lesquelles on a pu observer des magnifiques looks qui avaient la particularité d’être tous composés de pièces réalisées par différents créateur.ices. Il n’y avait pas de total look comme on dit dans le jargon de la mode. Cela pour la bonne et simple raison que l’idée était de permettre aux spectateur.ices de se projeter dans les looks, de rendre la mode plus accessible. L’objectif était parfaitement réussi et brillamment orchestré par le binôme de Paul Cadre, le directeur artistique, et Léa Lefouest, styliste, qui tient à souligner que ce défilé fut véritablement un travail d’équipe dans lequel ont été impliquées toutes les personnes du collectif. Ce choix de stylisme n’est pas anodin. En réalité, peu de créateur.ices acceptent de se lancer dans des défilés “multimarques”, alors que c’est cela qui rendait aussi le défilé plus humain et plus proche de celles et ceux d’entre nous qui admirions le spectacle. Léa Lefouest insiste sur ce point en rappelant que cela ne se fait pas assez mais que c’est une démarche qui permet aux créateur.ices de se retrouver “le temps d’une silhouette.”

Le défilé nous permet de découvrir les pièces d’une vingtaine de créateur.ices. La majorité d’entre eux fait partie du collectif UAMEP, d’autres ont été invité.es spécifiquement pour l’occasion. Cela a permis de composer 31 looks pour 31 mannequins, et surtout des mannequins qui nous ressemblent ! C’est la première fois que le collectif présentait autant de looks, se rapprochant de plus en plus de la moyenne de 45 looks qui sont présentés lors d’un défilé traditionnel. Là encore, un aspect novateur : chaque mannequin ne portait qu'un look qu’il ou elle gardait tout au long

du défilé. Un casting de mannequins inclusif et réaliste composé d’un mélange de professionnels et d’amateur.ices, certaines personnes défilaient pour la première fois, mais surtout un point commun : ils et elles étaient tous.tes bénévoles.


Le défilé se termine, les mannequins se réunissent sur les marches du palais Galliera le temps de permettre au public d’admirer le spectacle de danse, puis ça se termine en famille. Le public se lève, beaucoup de personnes partent rejoindre un.e mannequin dans les coulisses du défilé… c’était un moment chaleureux. On voyait à quel point les personnes dans le public étaient des proches des organisateur.ices et des mannequins et cela faisait vraiment plaisir à voir. C’était comme si pour une fois, la mode devenait quelque chose de réellement accessible à tous.tes.


Pour clore le défilé, Florentin Letissier, adjoint à la maire de Paris en charge de l’économie sociale et solidaire, de l’économie circulaire et de la stratégie zéro déchet, prend la parole en émettant son souhait de “faire de Paris la capitale de la mode engagée, durable et solidaire” et renouvelant ainsi le soutien de la ville de Paris à cette initiative.


Le pari est réussi et surtout l’ambition forte. Les initiatives existent mais sont elles capables à elles seules de défier l’industrie du luxe et de la haute couture ? Peut-on songer à des Fashion Weeks éthiques et durables dans un avenir proche ? Que se passerait-il dans le monde de la mode et du luxe si Paris devenait réellement la capitale de la mode éthique et durable ? Une ville comme Paris a en effet la possibilité de faire avancer les choses dans un milieu qui demeure l’un des plus polluants au monde.

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